Méditation
Iconostase

 Corps et âme !

 

Nous ne devons accepter, aussi bien, tels quels, ni notre corps ni notre esprit. Nous avons à recréer l’un et l’autre en nous libérant, finalement, de ce moi possessif, de ce moi biologique, de ce moi pesanteur, de ce moi cosmique qui nous empêche de nous réaliser, en nous imposant des idées ou des options préfabriquées. Car c’est dans la mesure où nous échappons à l’envoûtement de ce moi propriétaire et possessif que nous devenons vraiment nous-mêmes. Et non pas seulement nous-mêmes dans notre pensée, mais nous-mêmes aussi dans notre corps.

D’ailleurs, cette dichotomie, cette opposition abrupte du corps et de l’esprit, est absurde, meurtrière et dangereuse : rien ne la cautionnes. Il y a en nous, constamment, un mouvement du dehors au dedans et du dedans au dehors. Notre corps ne donne toute sa joie, toute sa beauté, tout son rayonnement et il n’atteint à son unité, comme il ne prend une expression humaine, que s’il est traversé par le courant de la vie intérieure. Et cette vie intérieure est elle-même impossible si elle ne s’exprime à travers le corps, si elle ne rayonne à travers  un sourire.

Le véritable itinéraire va, en réalité, non à sens unique du Corps à l’âme - pour nous évader du corps -, mais du moi biologique, du moi-servitude, du moi préfabriqué, du moi qui m’est tombé dessus comme un colis jeté sur un quai de gare du moi que je ne suis pas, en un mot au moi authentique, au moi spirituel, au moi origine, au moi créateur, au moi qui est source et valeur, au moi qui est universel, au moi qui est don, enfin, et que nous percevons dans la lumière et la transparence de l’amour.

Ce passage, ce changement d’étage, cette libération s’annonce et retentit nécessairement dans tout notre être. C’est tout notre être, corps et âme, qui devient personne, origine, source et valeur. Bien entendu, cela suppose que nous accomplissons notre métier d’homme et que nous acceptons vraiment de nous faire et de nous créer, en refusant de subir ce que nous sommes, selon la consigne de Camus.

 

Homélie du père Marc